top of page

L'éducation émotionnelle n'est pas un atelier

  • Felipe Arancibia
  • 10 juin
  • 3 min de lecture

Dernière mise à jour : 11 juin

ree

Selon le rapport Gen-AI: Artificial Intelligence and the Future of Work du Fonds Monétaire International (2024), « 40 % des emplois dans le monde seront affectés par l’intelligence artificielle. Dans les économies avancées, ce chiffre atteint 60 %, et environ la moitié de ces emplois subiront un impact négatif. »


Si l’on conçoit le système éducatif comme une chaîne permettant un accès qualifié au monde du travail c’est-à-dire que les écoles préparent à l’université, et l’université au travail une transformation massive devient inévitable, car ce que l’on enseigne aujourd’hui cessera d’avoir de la pertinence dans de nombreux domaines.


Pourquoi alors aller à l’école, si ce qu’on y enseigne ne sera plus nécessaire ?


Bien que nous ayons essayé pendant des décennies, nous continuons à éduquer comme si les cerveaux des élèves étaient vides et que les enseignants étaient les experts chargés de les remplir de contenus. Les tentatives pour positionner l’enseignant comme un médiateur entre le savoir externe et la connaissance de l’élève restent un rêve dans de nombreux contextes.

ree

Changer les paradigmes éducatifs

Clique sur l'image à gauche pour voir une excellente animation d'une conférence de Sir Ken Robinson.

Maintenant que n'importe qui peut photographier un problème arithmétique et obtenir le résultat, ou identifier une fleur et connaître son espèce, ce qui semblait autrefois essentiel perd son sens. Le professeur n'est plus la source principale du savoir : c’est l’intelligence artificielle, que nous portons dans les poches de nos pantalons.


La question précédente se répète à nouveau : à quoi bon aller à l’école si, tel que le système éducatif est conçu jusqu’à présent, cela n’a plus de sens ?


Tout processus mécanique réalisé par l’être humain sera éventuellement remplacé par une machine. Cependant, les machines pourront difficilement ressentir, être émues ou répondre avec empathie à la tristesse ou à la colère sans nuire aux autres. Elles pourront difficilement dialoguer avec affection, résoudre un conflit interpersonnel ou motiver un groupe à partir d’une connexion émotionnelle.


Ce que nous devons éduquer alors, ce sont les émotions, la manière dont nous nous lions aux autres et résolvons les problèmes de manière assertive, en résumé, les capacités humaines non automatisables.


La Ière Étude Nationale sur l’Éducation Émotionnelle dans les Écoles en Espagne (2021) conclut que miser sur l’éducation émotionnelle revient à investir dans le bien-être psychologique, l’adaptabilité à l’environnement et la future employabilité des élèves.
La Ière Étude Nationale sur l’Éducation Émotionnelle dans les Écoles en Espagne (2021) conclut que miser sur l’éducation émotionnelle revient à investir dans le bien-être psychologique, l’adaptabilité à l’environnement et la future employabilité des élèves.

Si aujourd’hui la for

mation aux valeurs ou à l’éthique reste marginale dans les institutions éducatives, elle doit désormais en devenir le cœur.


Il ne suffit plus de quelques ateliers par an, d’une sortie scolaire pour favoriser la cohésion ou d’un discours motivant hebdomadaire du professeur principal. Le cœur du travail scolaire doit être d’apprendre à être humain. Quelque chose de si simple, et pourtant si complexe.


Simple, car c’est ce que nous sommes : des êtres humains. C’est comme penser qu’un coiffeur expert doive apprendre à être coiffeur expert. Il l’est déjà. Pourtant, nos émotions et la façon de les vivre évoluent dans un processus complexe tout au long de la vie. En tant que mammifères, nous commençons à apprendre à vivre dans notre premier environnement, la famille. Ensuite, nous poursuivons cette socialisation dans un contexte plus large avec d’autres personnes, à l’école.


Beaucoup penseront : « D’accord, faisons-le. » Mais une autre question surgit : nos éducateurs adultes ont-ils eux-mêmes appris à gérer leurs émotions, à travailler en équipe, à être assertifs, etc. ? D’après mon expérience dans des écoles et institutions non formelles dans plusieurs pays d’Amérique latine, ma réponse est que nous avons encore un immense défi à relever.


À cela s’ajoutent les nombreuses données actuelles sur la santé mentale des enseignants : beaucoup souffrent d’anxiété et de dépression. D'autres quittent la profession avant cinq ans d’exercice, car ils se sentent dépassés par le contexte.


Il est donc urgent d’adopter une vision claire au niveau des politiques publiques. Il est impératif de former les nouveaux enseignants avec cette perspective, et de modifier en urgence les programmes scolaires pour que l’éducation socio-émotionnelle occupe une place centrale.


Nous serons remplacés au travail par des machines. Le seul bastion qui nous reste est d’embrasser notre humanité. Si nous ne le faisons pas, dans quelques générations, nos jeunes se sentiront plus à l’aise de parler à un robot qu’à un camarade incapable de dire « s’il te plaît » et qui règle tout par les larmes ou la violence.

 
 
 

Commentaires


bottom of page